Nouvelles missions pour les liturgistes
Marcel Metzger
Résumé
La reconnaissance de la liturgie comme sommet et source par le concile Vatican II est loin d’être admise dans toutes ses implications. Le principal obstacle provient des dérives qui se sont produites pendant le deuxième millénaire dans les Églises latines et qui ont formaté les institutions et les mentalités pour longtemps. La liturgie était devenue l’affaire du clergé, le peuple restait à l’écart. L’importation indue de la théologie sacramentaire hylémorphiste dans la pastorale et dans les catéchismes a encore aggravé la situation, en ignorant des dimensions fondamentales de la liturgie, dont la primauté de l’assemblée. Les courants pénitentiels diffusés à partir de l’époque médiévale ont rétrogradé la résurrection au profit de la croix douloureuse et influencé les spiritualités, déjà coupées de la liturgie. Toutes ces dérives ont laissé des traces, qui sont loin d’être totalement effacées, elles sont même parfois réactivées. Dans cette situation, il revient aux liturgistes de poursuivre l’oeuvre du concile Vatican II laissée parfois en suspens. Parmi les tâches urgentes, les premières sont sans conteste une réhabilitation de la pratique de la mystagogie et l’initiation des communautés et des fidèles à la prière à partir de la prière liturgique, et dans cette ligne, la révision de toutes les spiritualités qui négligent la liturgie.
Abstract
The recognition of the liturgy as summit and source by the Second Vatican Council is far from accepted in all its implications. The main obstacle comes from the excesses that occurred during the second millennium in the Latin Churches, which have shaped institutions and mentalities for a long time. The liturgy had become the business of the clergy, while the people remained on the sidelines. The undue importation of the Church’s sacramental theology into pastoral ministry and catechisms has further aggravated the situation by ignoring fundamental dimensions of the liturgy, including the primacy of the assembly. The spread of penitential currents from medieval times onwards have demoted the resurrection in favor of the painful cross and influenced spiritualities, already cut off from the liturgy. All these drifts have left traces, which are far from being totally erased; they are even sometimes reactivated. In this situation, it is up to liturgists to continue the work of the Second Vatican Council, which has sometimes been left in abeyance. Among the most urgent tasks, the first are undoubtedly the rehabilitation of the practice of mystagogy, the initiation of communities and the faithful to praying the liturgy, and in this line, the revision of all spiritualities that neglect the liturgy.
Marcel Metzger, né en 1940 à Mulhouse (France), prêtre du diocèse de Strasbourg, professeur émérite d’histoire de la liturgie à la Faculté de théologie catholique de Strasbourg. Principales publications en liturgie : Les Constitutions apostoliques (Sources chrétiennes 320, 329, 336), Les sacramentaires (Typol. sources MA 1994), Histoire de la liturgie (Paris, DDB 1994), L’Église dans l’Empire romain. Le culte, vol. 1 : Les institutions (Sankt Ottilien, Studia Anselmiana 2015, 703 p.).